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10 mars 2021 3 10 /03 /mars /2021 13:50

Si l’on a pu s’interroger sur la lourdeur de la sanction prononcée à l’encontre de l’ancien président de la République (trois ans de prison dont deux avec sursis), la transcription des écoutes téléphoniques et le jugement, montrent que les faits constitutifs des délits reprochés sont clairement établis.

On se demande alors comment et pourquoi un avocat d’expérience, a embarqué son « client » et « ami », dans une entreprise aussi périlleuse qu’inutile.

*

En 2014, l’ancien président de la République qui a obtenu un non-lieu dans l’affaire Bettencourt, a formé un pourvoi devant la chambre criminelle de la cour de cassation, aux fins de faire annuler la saisie de ses agendas présidentiels, mis sous scellé à cette occasion. Nicolas Sarkozy a-t-il de bonnes raisons de penser que ces agendas seraient une source de compromission pour d’autres affaires pendantes devant la justice ?

Une chose est sûre, il est pressé jusqu’à l’angoisse de savoir si les magistrats vont accéder à sa demande. Il s’en ouvre à son conseil et ami de toujours, Thierry Herzog, l’un des avocats pénalistes les plus capés de la place de Paris, qui a toute sa confiance.

L’avocat de l’ancien président est prêt à tout pour satisfaire son prestigieux client. Ce n’est pas commun d’être l’avocat d’un ancien président de la République et qui sait pourquoi pas futur, nul n’en sait rien.

C’est peut-être ce qui a conduit Me Thierry Herzog, plutôt que de prôner la sagesse en  disant à son impétueux client d’attendre tranquillement que la décision soit rendue, de chercher à le satisfaire, quitte à s’affranchir du respect du droit et de la déontologie.

Mais peut-être aussi a-t-il pensé que sous couvert de renseignements, l’intervention pouvait avoir un effet favorable sur les magistrats approchés et obtenir l’annulation de la saisie et la restitution des agendas.

Toujours est-il que l’on ne sait pas pourquoi l’avocat a fait prendre de tels risques à son client.  

Ce que l’on sait, c’est que Me Thierry Herzog va lui proposer  d’actionner un de ses amis, Gilbert Azibert, premier avocat général près la juridiction suprême dans une chambre civile, qui serait susceptible de pouvoir « se renseigner » sur l’état de la réflexion des magistrats de la chambre criminelle, couverte par le secret professionnel et dont la violation est punie par la loi pénale.

Le hasard faisant parfois mal les choses, il se trouve que le haut magistrat a postulé pour un poste de conseiller d’état à Monaco, histoire de s’occuper de la meilleure façon après sa retraite. Il  aimerait bien pour sa part que l’ancien président, fort de son entregent, lui donne ce que Thierry Herzog, à qui il s’en ouvre appelle « un petit coup de pouce ».

Un renseignement contre un petit coup de pouce, vraiment pas de quoi fouetter un chat.  A l’audience, Nicolas Sarkozy déclarera, « j’ai passé 40 ans de ma vie politique à donner des coups de pouce ».

Les trois personnalités vont accepter le deal qui s’est ainsi conclu implicitement entre eux, sans tiquer. Ce qui les fera basculer dans la corruption et le trafic d’influence. Cela est démontré sans ambiguïté à la lecture de la transcription des écoutes (1)

L’avocat et le magistrat ont certainement estimé, que ce n’était pas l’acte corruptif le plus odieux qui soit, Nicolas Sarkozy affirmant encore à l’audience qu’il n’avait pas eu conscience que l’accord tacite et indirect conclu avec Gilbert Azibert était constitutif d’une infraction. Pas d’argent, pas même de réalisation de l’objet du deal déclamera-t-il partout.

De toute façon la question du risque semble ne pas s’être posée, pourquoi s’embarrasser « de ces détails », puisque personne n’en saura rien.

Me Thierry Herzog, maître d’œuvre de l’opération, en fait son affaire. Il a fait l’acquisition d’un téléphone portable, avec une ligne ouverte sous le faux nom de Paul Bismuth, avec laquelle son client communiquera avec lui pour les besoins de la cause...Il déclarera à l’audience que c’était pour éviter que l’on pirate les communications de l’ancien président de la République.

Cerise sur le gâteau, les écoutes révèleront que son conseil et ami Me Thierry Herzog, lui proposera même  d’embaucher un détective privé pour on ne sait quelle mystérieuse mission, ce qui cette fois ci aurait  purement et simplement pu conduire son célèbre client, à s’en aller tâter de la paille humide des cachots de la République. Peut-être son seul moment de lucidité dans cette affaire, Nicolas Sarkozy refusera tout net, mais il faut reconnaître que c’était un peu gros.

*

A la lecture des transcriptions on observe un Nicolas Sarkozy inquiet, angoissé, fébrile, impatient, dépourvu de toute lucidité, posant souvent les mêmes questions, complètement perdu entre les mains de son avocat qui cherche à le rassurer plus qu’à l’informer, un Nicolas Sarkozy ne se rendant  pas compte qu’il n’y a rien de crédible dans ce que son avocat  lui susurre tout au long d’interminables communications téléphoniques où l’on parlait de tout et de rien.(2)

Il est fort probable que l’avocat de Nicolas Sarkozy se soit rendu compte que son « honorable correspondant » le menait en bateau, lui laissant croire qu’il avait pu s’introduire dans les secrets de la chambre criminelle. Mais il a préféré continuer de jouer le jeu, un jeu qui l’avantageait, pour pouvoir lui-même se donner de l’importance auprès de son prestigieux client, que par la même il bernait sans vergogne.

Cette absence de crédibilité de l’avocat général sur les « précieuses » informations qu’il aurait réussi à obtenir, résultera  aussi de l’audition des conseillers présumés approchés, qui ont déclaré qu’ils n’avaient pas été sollicités par leur collègue ou dans le strict cadre de ses fonctions de correspondant d’une revue juridique.

Le président de la chambre criminelle, lui aussi entendu,  affirmera que les éléments supposés provenir du délibéré de sa formation, que l’on peut lire dans la transcription établissent par leur caractère totalement erroné qu’ils n’ont pu être donnés par l’un des membres de la chambre criminelle.

Enfin, alors que Me Thierry Herzog faisait une relation des plus optimistes de ce qui se passait à la chambre criminelle, en vue  de complaire à son fébrile client, la chambre criminelle devait rejeter la demande de restitution des agendas.  

*

Quand l’on fait le bilan de cette triste pantalonnade, on se demande comment un avocat digne de ce nom a pu embarquer son client et ami, dans pareille galère, le conduisant sans réel intérêt, à commettre des infractions susceptibles de lui faire subir les tourments  du déshonneur, la pire des sanctions pour un ancien président de la République.

Pour autant, on peut lire dans le cours des transcriptions et à chaque communication téléphonique, que  l’ancien président remerciait sans mesure son avocat et ami pour tout ce qu’il faisait pour lui avec comme touche finale un « Merci mon Thierry pour tout ce que tu fais pour moi,  je t’embrasse»

Et à l’audience il précisera encore : « ce n’est pas un ami, je le considère comme faisant partie de ma famille ».

 

*

 

(Extraits du jugement de la 32e chambre du tribunal judiciaire de Paris en date du 1er mars 2021, pages 173, 174, 175

(1)La partie de transcription qui établit le pacte de corruption

Gilbert Azibert a rendu le service, reste à démontrer qu’il y a eu intention d’une contrepartie : le poste à Monaco. La corruption étant un délit formel, « l’élément matériel se réduit à un simple comportement, les suites de la sollicitation important peu ». En l’occurrence, pour la procureure, Gilbert Azibert lorgnait un poste au Conseil d’État monégasque – cinq conversations avec son ancien ami Francis Casorla, conseiller d’État de la principauté, en attesteraient. Nouvelle slide. 5 février 2014, Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog échangent sur la ligne Bismuth. Voilà ce qu’ils se disent :

— [TH] Non, parce que ce n’est pas pratique. Je lui ai dit qu’après tu le recevrais mais que tu savais…

— [NS] Bien sûr.

— [TH] […] parfaitement ce qu’il faisait, d’accord. Et donc, il était très content.

— [NS] Moi, je le fais monter.

— [TH] Il m’a parlé d’un truc à sur Monaco, parce qu’il voudrait être nommé au tour extérieur. Je lui ai dit, écoute, heu…

— [NS] Je l’aiderai.

— [TH] T’inquiète pas, mais bien sûr, je lui ai dit t’inquiète pas, laissons passer tout ça et comme c’est pas avant mars que la personne prend sa retraite, tu, t’auras toujours le temps de, de voir le président, il te recevras, tu le sais très bien.

— [NS] Parce que, parce qu’il veut travailler à Monaco ?

— [TH] Ben oui, parce qu’il va y avoir un poste qui se libère au Conseil d’État monégasque et, heu, il était bien placé. Mais simplement, il me dit, heu, j’ose pas demander. Peut-être qu’il faudra que j’ai un coup de pouce. Ben je lui ai dit : tu rigoles avec ce que tu fais…

— [NS] Non, ben t’inquiète pas, dis-lui. Appelle-le aujourd’hui en disant que je m’en occuperai parce que moi je vais à Monaco et je verrai le Prince. »

(2)Une partie de transcription qui montre le peu de crédit de l’informateur et les liens d’amitié entre Nicolas Sarkozy et son avocat.

• Thierry HERZOG : Bon, alors, j'ai eu Gilbert ce matin. • Nicolas SARKOZY: Humm hummm. • Thierry HERZOG: Il me dit que d'après lui, oui. Parce qu'il a eu accès à l'avis qui ne sera jamais publié du rapporteur destiné à ses collègues, euh... et que cet avis conclut que pour toi à la cassation, et à la... au retrait de toutes les mentions relatives à tes agendas. Tu sais que là, c'est du boulot • Nicolas SARKOZY : Que là, c'est du quoi ? • Thierry HERZOG : Ce sera du boulot pour ces bâtards de Bordeaux • Nicolas SARKOZY: Pourquoi? • Thierry HERZOG : Bah, à toutes les pages ils parlent de tes agendas. Enfin, très souvent. Entre la saisie, entre... entre les tableaux des prétendues concordances entre les rendez vous de Madame Bettancourt euh... et euh... à l'Elysée pour une décoration, et ceci et cela. Ton agenda exploité pour les venues de Philippe COURROYE. Ton agenda exploité... Tu vois le travail que c'est? • Nicolas SARKOZY: Hum. • Thierry HERZOG Quand il confond Mercier. Le rendez vous avec Mercier, il croit que c'est le Garde des Sceaux alors qu'il vient pour le grand Paris. Enfin, tout ce qu'on savait. Non, mais c'est surtout... si on a la chance que ça marche, euh.... •Nicolas SARKOZY Est ce que ça a été publié ça? • Thierry HERZOG : Non. Alors, l'avocat Général l'a envoyé à Spinosi qui me l'a tout de suite envoyé, ça il est.... évidemment, en lui disant "Maître euh... je vous adresse... à votre usage et à celui de vos confrères concernés mon avis dont je vous prie de noter qu'il ne doit en aucun cas être diffusé". Evidemment, j'ai dit à SPINOSI, surtout, ayons la chance jusqu'au 11 de préserver le truc le plus secret possible, c'est pas la peine de se vanter, de ci, de ça, pour indisposer la Cour, et qu'on pense l'on est des... qu'on vend la peau de l'ours, etc... • Nicolas SARKOZY: Parce que... l'avis de l'Avocat Général n'est pas public? • Thierry HERZOG: Non. Absolument pas. • Nicolas SARKOZY: Il l'a envoyé à Spinosi par correction? • Thierry HERZOG : Par correction, par respect du principe du contradictoire, etc... Mais il aurait pu, m'a dit Spinosi, le verser directement au dossier sans me le donner. Bah, je lui dis "c'est fou !!!' Il m'a dit oui. Alors, je lui ai dit, sans savoir ce que je sais, je lui dis "Quand c'est comme ça, c'est qu'on a des chances sérieuses d'après toi? ". il m'a dit "oh oui". Nicolas SARKOZY: Et sur [inaudible], ils ne cassent rien sinon? Thierry HERZOG : Rien. Si, il suggère la cassation mois pour, ce qui n'a aucun intérêt, euh... pour l'expertise psychologique de Bannier, de je sais plus qui.. et de De Maistre, qui n'est pas correcte. Bon, mais enfin, ça euh.., de toute façon, il suggère une cassation sans renvoi aussi, c'est à dire euh... le juge n'avait pas le droit d'ordonner en matière correctionnelle une expertise psychologique des prévenus. Euh.... donc euh... on la... on la retire du dossier par voie de retranchement, et c'est fini. Nicolas SARKOZY: Donc, dès qu'on a la décision le 11, si ça marche comme ça, on peut faire euh... Bon bah parfait, ça c'est une très bonne chose. • Thierry HERZOG : Ecoutes, tu sais, ça c'est bon. • Nicolas SARKOZY : Bon. Parfait parfait parfait parfait. Et notre ami Valdiguié n'a rien de plus? Page 173 / 254 La suite de la conversation n'intéresse pas l'enquête en cours. La retranscription est interrompue à compter de l'indice 06:57 et reprise à partir de l'indice 07:53 • Thierry HERZOG : Je sais pas, et puis ils m'ont pas rappelé aujourd'hui, et je te dirai qu'aujourd'hui, j'étais un peu sur euh... sur le truc là, je voulais être sûr de... de joindre Gilbert. le machin... J'étais beaucoup sur cette histoire là. Parce que d'expérience, tu vois, je suis pas avocat à la Cour de Cassation, et puis après, je te laisse, mais d'expérience, euh... c'est assez rare qu'un avocat général écrive ce qu'il écrit. Franchement hein. Non, quand il y a vraiment une règle de droit, euh.... Bon. • Nicolas SARKOZY : Mais là, donc, on n'en profite pas, on fait rien fuiter Mais les autres avocats pourront faire ... fuiter • Thierry HERZOG : Oui mais quel est leur intérêt de dire que pour Sarkozy, l'avocat général, qu'est ce que ça peut foutre? Puis bon, c'est quand même des types de confiance. Je les vois pas faire une connerie pareille. • N icolas SARKOZY : Bon. Donc, le 11 février, il y a la décision de la Cour. • Thierry HERZOG :Il y a l'audience, ça peut être mis en délibéré. • Nicolas SARKOZY: Oui. [inaudible] • Thierry HERZOG: Ah oui. Et puis... euh... il va le dire en disant que... voilà. La, je t'ai résumé, mais tout avant, il y a le développement en disant que euh... ce qui a été soutenu dans les mémoires devant la chambre de l'instruction est l'exacte application de la loi que les juges ont méconnue. Que... ils t'ont traité en gros avec beaucoup de légèreté. Ah non, attention, il est sévère !!! • Nicolas SARKOZY : Bon, et sur le... le... le... le la recevabilité? • Thierry HERZOG : Alors sur la recevabilité, c'est très bien aussi parce que.... il pose le problème, mais tout de suite il dit que c'est recevable, pour lui, et de toute façon, on sait par Gilbert que ça l'est... En disant que... certes, sur la recevabilité du pourvoi.., voilà... li apparaît bien que, malgré le non lieu dont il a bénéficié à titre personnel, Monsieur Nicolas SARKOZY peut continuer à revendiquer un ntérêt à agir. La saisie des agendas d'un Président de la République pose un problème de principe qui est devenu par suite du non lieu dont il a bénéficié, étranger à l'examen du fond du dossier. La preuve en est d'ailleurs, que l'ordonnance de non lieu n'y fait aucune référence et qu'aucun mémoire en défense n'est venu s'opposer au mémoire ampliatif. Ça, pour ça d'ailleurs, après, on les verra, comme on avait dit qu'on ferait puisque... ils ont tenu parole et Hugues MOREL, euh... mais 'enfin surtout leurs avocats respectifs et DUCOS ADER à la Cour de Cass n'ont... euh... tu es le seul contre lequel ils n'ont pas pris de mémoire en défense. •Nicolas SARKOZY: Bon, ben très bien. Bon ben génial Thierry. Je t'embrasse, tu es vraiment un ange. • Thierry HERZOG : Bon, je t'embrasse, allez, on se reparle. • Nicolas SARKOZY : Et encore merci mon Thierry. • Thierry HERZOG : Mais tu plaisantes !!! Merci de rien du tout. Allez, je t'embrasse

 

« • Nicolas SARKOZY Deuxièmement. J'ai vu notre ami.... qui a une femme un peu compliquée. Page 174 / 254 • Thierry HERZOG: Oui. • Nicolas SARKOZY; hein? • Thierry HERZOG: Oui. • Nicolas SARKOZV: Qui m'a confirmé que ... euh.... là bas, ça se passait très bien. Des deux points de vue. • Thierry HERZOG: Oui. • Nicolas SARKOZY: Euh... C'est à dire, tu sais, le........bah, il avait vu le rapport de l'avocat, hein... général. • Thierry HERZOG: Oui. Oui. • Nicolas SARKOZY: Il m'a confirmé que pour euh... le Conseiller Rapporteur, ça se présentait bien aussi. • Thierry HERZOG Ouais ouais, tout à fait. Mais il est venu au bureau, me voir. • Nicolas SARKOZY: Quand? • Thierry HERZOG: Jeudi après midi. • Nicolas SARKOZY: Bon. Et.... • Thierry HERZOG jeudi après midi. Bon, en fait, c'est pas mal parce que, si tu veux, moi, je ne lui ai pas parlé de l'autre correspondant, c'est pas la peine. • Nicolas SARKOZY: Bah bien sûr !!!! Bien sûr !!!! • Thierry HERZOG: Évidemment !!! Évidemment, je l'ai mis en avant. Je lui ai dit c'est super ce que vous faites, allez y !!! Voilà. Tu l'as lu le truc? C'est bien !!! • Nicolas SARKOZY: Ah le truc est très bien. • Thierry HERZOG : C'est remarquable. • Nicolas SARKOZY: Le truc est très bien. • Thierry HERZOG : Ah, c'est remarquable !!! • Nicolas SARKOZY: Le truc est vraiment très bien. Euh... Il m'a dit qu'il aurait entendu des bruits, je ne sais pas s'il t'en a parlé, • Thierry HERZOG: Oui ? Sur quoi? • Nicolas SARKOZY: D'agitation de certains. • Thierry HERZOG: Oui. De lobbying de certains pour empêcher? • Nicolas SARKOZY: Oui, mais ça.... Non, mais sur un autre truc... Euh.... Euh.....Dans l'affaire libyenne, que certains magistrats perdaient un peu patience, commenceraient à s'énerver, mais ça me semble il très bizarre. Euh.... • Thierry HERZOG: Ouais.... • Nicolas SARKOZY: Jusqu'à.... • Thierry HERZOG : Enfin moi j'ai trouvé un truc, excellent. La transcription est interrompue à l'indice 04:31 et reprise à l'indice 07:30: Nicolas SARKOZY: Mais, heu, il aurait entendu dire que peut-être ils envisageaient de faire une perquis • Thierry HERZOG : Ouais, bof, du parles! • Nicolas SARKOZY: Moi, ça m'étonne, parce qu'avec les deux dossiers en même temps, ça serait curieux de, de perquisitionner un type qui est partie civile par ailleurs • Thierry HERZOG : Ah ben oui, oui. Puis, il faut quand même des indices • Nicolas SARKOZY: Oui, oh! • Thierry HERZOG : Non, mais de toute façon je sais ce que c'est ça, c'est tout ça parce qu'évidemment tout doit se murmurer. ils savent très bien que, heu, si il y a la cassation, heu, ça va poser un vrai problème pour eux • Nicolas SARKOZY: Pourquoi? • Thierry HERZOG : Ben pourquoi, parce que dans l'affaire, heu, tout part... les rendez-vous, etc, tout ça on est obligé de canceller, d'annuler tout ça. On peux plus en faire référence • Nicolas SARKOZY: Hum, hum, hum • Thierry HERZOG : Donc, le dossier, c'est un gruyère • Nicolas SARKOZY: Hum Page 175 / 254 • Thierry HERZOG : Déjà, si on a la chance que ça marche, je disais à Patrick, heu, le dossier de ils vont avoir du travail, hein, pour tout enlever • Nicolas SARKOZY: Non, mais, heu, mais dans l'affaire KHADAFI, ça, ça ne change rien là ? Entre guillemets • Thierry HERZOG: Non, bien sûr. Mais moi je le vois dans l'autre affaire., je le vois pas dans celle-là • Nicolas SARKOZY: D'accord, hum... Ah, tu crois? • Thierry HERZOG : Oui, mais je vois ça, c'est... il m'en a parlé, je lui ai dit, je veux même pas en parler à Nicolas, c'est de l'intox, tout ça c'est du pipot. • Nicolas SARKOZY: Pourquoi tu dis ça? • Thierry HERZOG : Parce que c'est, c'est, c'est de l'intox. Ils veulent, ils veulent faire les malins. C'est pas... et puis de toute façon, heu... Non mais c'est vrai que... cette histoire de, de, d'instruction qui est ouverte à PARIS, c'est véritablement heu, c'est véritablement incroyable quoi. • Nicolas SARKOZY: Oui... enfin. Sans compter la, l'appartenance au syndicat de la magistrature • Thierry HERZOG : Oui et puis y a plus que ça, y a le syndicat de la magistrature pour une, y a la pétition pour les deux autres, y a la troisième, y a la première pétition de tout pour VAN RUYMBEKE, oui!, oui... • Nicolas SARKOZY: Il faudrait peut être que tu prennes contact quand même avec nos amis... heu... pour qu'ils soient attentifs... • Thierry HERZOG : Oui • Nicolas SARKOZY : Tu vois ce que je veux dire? • Thierry HERZOG : Bien sûr, bien sûr • Nicolas SARKOZY: On va voir • Thierry HERZOG : Oui, oui, bien sûr, bien sûr, bien sûr. Hum, hum. • Nicolas SARKOZY: Bon, on ne sait jamais, moi je n'y crois pas tellement m'enfin. • Thierry HERZOG : Moi moi non plus, non, non mais de toute façon... Oui, oui, je vais passer un coup de fil puis j'irai le voir. La retranscription est interrompue à l'indice 10:08 et reprise à l'indice 10:37: • Thierry HERZOG : Non, mais pour revenir à notre sujet principal, heu, non, non, je suis assez de ton avis c'est de l'intox. Mais je vais quand même appeler mon correspondant là ce matin • Nicolas SARKOZY: Parce qu'ils sont obligés de passer par lui • Thierry HERZOG : Oui, oui, oui, oui c'est ça, hum, hum • Nicolas SARKOZY: Tu as, tu as son téléphone personnel? • Thierry HERZOG : Qui bien sûr. Et puis j'ai un, un discours avec lui qui est prêt quand on se parle • Nicolas SARKOZY: Et demande lui si il n'y a pas de... • Thierry HERZOG : Oui oui mais bien sûr... je te dis j'ai un discours avec lui qui est prêt • Nicolas SARKOZY: D'accord • Thierry HERZOG: quand je l'appelle • Nicolas SARKOZY: d'accord, ok • Thierry HERZOG : Il comprend tout-de-suite de quoi on parle. • Nicolas SARKOZY: bon • Thierry HERZOG: Qu'est ce que je voulais te dire d'autre .... Sinon, c'est bien le... les réquisitions... Parce que, je disais à Patrick, de toute façon, c'est d'autant bien que... C'est surtout bien, parce que d'abord, euh... il contourne très très bien le problème de l'irrecevabilité, et il tacle quand même sérieusement les juges au regard de ta qualité, hein. Trois fois, ils le disent hein, que la qualité de Président a été volontairement, délibérément disent-ils, ignorée !!! C'est très grave. Ah, Patrick était content. • Nicolas SARKOZY: Ah, c'était bien, c'était bien ça... c'était bien. Page 176 / 25

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9 mars 2021 2 09 /03 /mars /2021 10:32

Si la crise politique que vient de connaître notre pays semble se calmer, la crise sanitaire et par voie de conséquence la crise économique, perdurent et s’amplifient et le peuple souffre.

Le peuple souffre d’autant plus qu’aucune perspective de sortie de crise ne se profile à l’horizon et que la transparence dans le processus de vaccination contre la COVID 19, n’est pas vraiment de mise.

La Tunisie ne peut, dans ce domaine,  donner plus longtemps l’image d’un bateau ivre, sans gouvernail, alors que le Corona continue d’accomplir méthodiquement sa sinistre besogne.

Pour que nous ne continuions pas chaque jour à compter les morts et à renvoyer chez eux faute de soins les malades, pour que l’économie reparte et que les couches les plus fragiles de la population ne sombrent pas dans une situation de grande pauvreté, par respect vis-à-vis de notre peuple qui a su il y a à peine dix ans, ne l’oublions pas, courageusement s’engager dans la voie de la démocratie, nous n’avons plus le droit de tergiverser.

Nous en appelons à l’Unité Nationale, avec comme objectif « la sauvegarde du peuple tunisien» par la mise en œuvre d’un plan national de vaccination, avec mandat donné à une autorité ad hoc d’élaborer un cahier des charges qui permettra de vacciner la population tunisienne.

Arrêtons avec les querelles d’égo, de préséance, de rapports de force, déclarons la vaccination cause nationale,  recherchons le ou les pays prêts à nous fournir rapidement les doses nécessaires selon un calendrier déterminé, avec paiement différé si les finances publiques ne sont pas en mesure de faire face à pareille dépense.

On sait que la Tunisie, qui depuis la révolution de jasmin a joué le premier rôle dans la cause historique du « printemps arabe », détient des atouts géopolitiques et d’équilibre dans les rapports de force internationaux, de cette région du monde.

Mais ce n’est pas en se montrant divisés et incapables de marcher du même pas que nous y parviendrons.

Nous sortons d’une grave crise qui n’est toujours pas réglée. Les problèmes demeurent entiers. Nous sommes dans la situation d’une famille dont les membres se sont entredéchirés à la suite d’un grave différend, et qui devant une situation dramatique qui les atteint, prennent conscience de la futilité si ce n’est de l’absurdité de leur querelle et décident alors de se réconcilier pour le bien de tous.

Mais il faut bien être réaliste. Rien ne pourra se faire tant que nos  institutions ne seront pas sécurisées juridiquement. Il faut préalablement régler les causes de ce qui nous a valu un grand désordre dans le domaine institutionnel.

Car les mêmes causes produisant toujours les mêmes effets, le risque de voir un nouveau conflit entre les deux têtes de l’exécutif est latent.

Ce type de conflit était prévisible avec la mise en œuvre d’une nouvelle constitution. La seule façon de le résoudre est de mettre en place la Cour constitutionnelle, dont l’objet est justement de régler ce type de situation.

A raison de divergences profondes qui existent entre le président de la République et l’Assemblée des Représentants du Peuple, c’est devenu une nécessité.

Il est donc impératif que les membres de cette institution soient désignés sans délais par ceux qui en ont la charge, et que la Cour soit  immédiatement installée.

Sans ce rouage essentiel qui existe dans tous les pays du monde, l’instabilité sera permanente et le pays, rapidement ingouvernable, continuera à dépérir.

*Article publié dans le journal La Presse de Tunis mardi 9 mars 2021, par Abdelmajid SAHNOUN ancien Haut fonctionnaire    

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8 mars 2021 1 08 /03 /mars /2021 09:07

En cas de deuxième tour Emmanuel Macron - Marine Le Pen à la présidentielle, le journal Libération du 17 février a publié un article dans lequel des électeurs de gauche ont déclaré qu’ils ne voteraient plus pour le candidat républicain en vue de faire barrage au Rassemblement National. Jean-Luc Mélenchon vient de faire une déclaration similaire sur France-info, prétextant que le temps où l’on donnait des consignes de vote est révolu, tandis qu’Eric Piolle, maire de Grenoble, dont on dit qu’il représentera le mouvement écologiste à la prochaine échéance présidentielle, a éludé la question au motif que ce sera le candidat de son mouvement qui occupera la place de finaliste à l’élection suprême.

Que se passe-t-il ? Peut-être que la gauche ne croit plus -si tant est qu’elle n’y a jamais cru- qu’avec Marine Le Pen présidente de la République, on verrait défiler sur les champs Elysées les bataillons des milices fascistes de génération identitaire, chemisés de noir et armés jusqu’aux dents, pour instaurer une dictature fasciste, tout comme l’on devait voir en 1981 les chars soviétiques occuper la Place de l’étoile si « par malheur » Mitterrand était élu…

Une hypothèse de plus en plus rejetée qui n’a que trop servie. Les institutions viscéralement républicaines de la France, armée, police, corps constitués et la maturité politique du peuple français ne laissant aucune place à ce type d’aventure.

Il ne reste plus que Christophe Castaner pour crier que le fascisme ne passera pas, ne s’étant pas rendu compte que le temps où l’on faisait descendre les lycéens dans les rues pour s’opposer à l’instauration imminente d’une dictature type Chili dans les années 70, avec Jean-Marie Le Pen au second tour de scrutin, est bien révolu.

En réalité le problème de ce revirement d’une partie de la  gauche, sur le front républicain, est bien plus politique qu’il ne paraît. La gauche en miette a peu de chances à terme, de prendre le pouvoir et pour longtemps. En habituant ses électeurs à voter pour un candidat de droite, la gauche a laissé son électorat se désagréger dans le paysage politique au risque de disparaître à jamais, ses électeurs préférant avec tant d’autres rejoindre le camp de l’abstention, désormais premier parti de France.

Laissons élire Marine Le Pen en 2022, se disent-ils, son incompétence, la gestion impossible d’une dette énorme accumulée à la suite de la pandémie, son autoritarisme pour réprimer la délinquance qui mettra le feu aux banlieues, rendra le pays rapidement ingouvernable et le peuple en appellera alors en réaction à la bonne vieille gauche généreuse, libérale et bienveillante avec tous.

Quant à la droite, si elle demeure hostile au Rassemblement National, y compris pour une alliance de circonstances, c’est parce que elle sait qu’il lui arriverait ce qui est arrivé au Parti communiste français, elle disparaitrait. C’est pour elle une question de survie. Reste à voir si ses électeurs sont du même avis, les sondages montrent que c’est de moins en moins probable pour un pourcentage assez important.

Marine Le Pen pour 2022 ? Une hypothèse qui n’est plus écartée par les observateurs de la vie politique, l’insécurité prenant le pas sur tout le reste ce qui pourrait, si elle venait à s’aggraver encore,  faire de la fille de Jean-Marie Le Pen, aux yeux de nombre de français désemparés, non plus un danger pour la démocratie, mais un recours.

 

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7 mars 2021 7 07 /03 /mars /2021 18:23

It was President Saied who opened hostilities, by blocking the process for the appointment of eleven new ministers from a reshuffle. He refused to take their oath, on the grounds that some of them -but without saying which - were suspected of having committed acts that could be qualified as conflicts of interest, or even corruption - but without saying which ones. It was an unusual position to be taken by the President, to blacklist individuals thrown as fodder for public opinion by undermining their honor and their standing, without even specifying the criminal acts, while no legal proceedings are in progress, and consequently no court decision has been taken against any of the accused, and without any concern for constitutional legal principles, such as separation of powers and presumption of innocence. Some time later, President Saied added another justification for his refusal to receive the oath, that the appointments were reportedly not in accordance with the constitution -but here again, without saying where the unconstitutionality lies. By preventing 11 ministers from taking office, President Saied has blocked the functioning of the government. Some have talked about a political coup- it does indeed strongly resemble one. President Saied then went off to be applauded by passers-by on Bourguiba Avenue and in the Ariana neighborhoods, thus showing that he had popular support. We understand that the matter is serious and that a risk of confrontation cannot be ruled out, the President of the Assembly of People’s Representatives, Rached Ghannouchi, certainly not being disposed, whereas he heads the first party in the Assembly and a majority that allows it to govern, to give President Saied more power than the constitution confers on him. In a parliamentary system such as it was desired by the constituents of 2014, the head of government appoints the ministers he intends to submit to the vote of the Assembly of People's Representatives. When the latter has validated the choice of the head of government, the president, who does not intervene in this choice, except for the ministries of defense and foreign affairs - which is not the case in this case - receives their appointment oath. This is all very clear. But by refusing the formality of taking the oath, by taking the risk of contravening the constitution, what is the President seeking? If it is - as everything suggests - in order to be able to be consulted on the appointment of ministers and to influence this important act, it would be an unprecedented situation, because why then would it not do the same for the other powers and in particular for the legislative power by taking it over by refusing to promulgate the laws that do not suit him and thus holding the essence of this power. There has been talks of a constitutional coup. We will see how it all unfolds, but it is certain that in the situation we are currently witnessing in Tunisia, perhaps we could have done without such a crisis.

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3 mars 2021 3 03 /03 /mars /2021 08:53

Un ancien président de la République, un haut magistrat de la cour de cassation, un ténor du barreau de Paris, tous trois debout, côte à côte, qui écoutent penauds les bras le long du corps, le prononcé de leur condamnation à trois années de prison dont une ferme, pour corruption et trafic d’influence.

Une humiliation parmi les pires qui soient, un choc terrible pour des prévenus qui s’attendaient à une relaxe.

Des années d’enquêtes, des centaines d’heures d’écoutes téléphoniques, un déploiement d’enquêteurs et de magistrats mobilisés sans mesure, les communications téléphoniques du gratin du barreau parisien surveillées dont celles de l’actuel garde des sceaux, une procédure gigantesque qui aboutira à une audience publique de plusieurs jours, avec un jugement de 254 pages rendu ce 1er mars 2021.

La justice pourtant de plus en plus pingre, même pour des procédures qui touchent à l’intégrité des personnes, n’a pas été comptable de son temps ni de son argent, pour une affaire sur le fond somme toute dérisoire, insignifiante en soi, qui n’a causé aucun préjudice à qui que ce soit, qui n’a même indisposé personne, dénuée de tout intérêt, si ce n’est la personnalité des intéressés.

Pour Nicolas Sarkozy, une affaire de plus, venant après plusieurs autres, qui s’étaient achevées sans aucune condamnation. Mais il faut toujours se méfier de l’eau qui dort. Cette fois-ci, ce sera  une série de maladresses, qui prises individuellement ne sont pas illégales, mais dont l’accumulation a créé un contexte, qui a certainement contribué à emporter la conviction des juges.

Mais que s’est-il passé ?

D’après ce que l’on a pu lire ou entendre, il y a plus de six ans, Nicolas Sarkozy a souhaité récupérer ses agendas de rendez-vous présidentiels, qui avaient été saisis à l’occasion de l’affaire Bettencourt, affaire qui s’était terminée par une relaxe ou un non-lieu, je ne sais plus.

Une demande aux fins d'annulation de leur saisie, pendante devant la cour de cassation et sur laquelle l'ancien président était impatient d'en connaître le résultat.

L’ancien président en parlera alors naturellement à son avocat et celui-ci, croyant bien faire, en parlera à l’un de ses amis avocat- général à la cour de cassation, pour qu’il s’informe auprès de ses collègues.

C’est un peu dans l’ADN de ces hommes de pouvoir de la vieille école, ou de ceux qui gravitent autour, que de chercher à passer par des chemins de traverse ombrageux, même quand la voie normale suffirait.

Peut-être que l’avocat a voulu faire preuve de zèle vis-à-vis de son prestigieux client, en actionnant ses relations jusque dans le saint des saints de la justice.

Mais tout ne va pas toujours comme l’on veut et le Haut magistrat contacté, a saisi l’opportunité qui lui était donnée, pour lui faire part à son tour d’une demande qu’il avait faite auprès de la principauté de Monaco, pour obtenir des vacations au sein de la juridiction monégasque.

Demande saugrenue de la part d’un haut magistrat, que celle consistant à rechercher un emploi manifestement sous calibré, dans une juridiction juridiquement de peu de prestige et d’avoir sollicité un ancien président de la République pour qu’il intervienne dans cette piètre affaire.

Nicolas Sarkozy, répondra semble-t-il à l’avocat, ce que répondent en substance tous les hommes de pouvoir assaillis de ce type de demandes incongrues : je verrais ce que je peux faire mais je ne promets rien. Et il ne fit rien.

Notons pour la petite histoire, que le haut magistrat lui non plus ne fit rien de déterminant, ses collègues entendus par la police ont déclaré n’avoir  reçu aucune demande de sa part, ce qui n’est pas étonnant, les coups de bluffs étant légion dans ce type de relations. 

Pour faire bonne mesure dans les absurdités, tout ceci par voie d’échanges sur un téléphone portable avec une ligne ouverte au nom de Bismuth, une autre lumineuse idée de l’avocat qui sans être illégale, est à tout le moins des plus discutables quant à son intérêt, sauf à rendre les échanges avec son client des plus suspects ; on connait la suite…  

Et comme M. Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, ces trois hautes personnalités venaient de prendre le tournant du déshonneur de leur vie en scellant, certainement sans même s’en être rendu compte, le jugement qui quelques années plus tard, les feront condamné pour corruption par la 32e chambre du tribunal judiciaire de Paris.

Ils ont donné comme l’on dit le bâton pour se faire battre.  

Comment en est-on arrivé là ?

Le jugement l’explique clairement : outre les éléments constitutifs des infractions reprochées, c’est la personnalité des prévenus qui a joué à fond dans cette affaire, ainsi que  des manquements graves à la morale et à la déontologie, inacceptables selon une sociologie qui a consacré des rapports nouveaux entre les individus et la société.

Pendant longtemps, pour un haut responsable politique, le fait d’avoir eu la confiance du peuple pour exercer les plus hautes responsabilités, ou pour un avocat d’être respecté et reconnu par son ordre, ou pour un magistrat d’être arrivé au sommet de la pyramide judiciaire, étaient des atouts qui, en cas de mauvaise fortune, allaient s’inscrire à leur crédit. Aujourd’hui, d'atténuantes, les circonstances sont devenues aggravantes et susceptibles d’emporter la conviction des juges pour le prononcé de peines lourdes.

Mais que l’on ne se méprenne pas, il n’y a là aucune vengeance ni aucun règlement de compte et le syndicat de la magistrature n’a rien à voir dans cette affaire. Ce serait d’ailleurs lui donner une importance qu’il n’a pas, même si il a participé avec beaucoup d’autres, à la cristallisation de l’évolution de notre société vers un monde où tout doit être égal à tout et où certains pensent devoir à tous les niveaux, rééquilibrer le fléau de la balance au profit de ceux, pour qui la vie n’aura pas été favorable,  quelles qu’en soient les raisons.

Cela va beaucoup plus loin que l’évolution de la justice au sein de l’appareil judiciaire, celui-ci n’étant qu’un épiphénomène parmi d’autres, résultant d’un processus général.

C’est en effet en réalité la société toute entière qui a évolué au cours des dernières décennies. L’état d’esprit a changé, on a changé de paradigme.

Autrefois, celui qui réussissait était respecté et admiré, et ses proches se plaisaient à s’identifier à lui.

Aujourd’hui, les choses ont bien changé, il y a envers eux une suspicion d’improbité, voire d’immoralité objective, pouvant parfois aller jusqu’à la détestation, au motif qu’ils renvoient envers les autres   l’image de leur échec, un échec qu’ils vivent comme une injustice de la société envers eux.      

De la sorte, rien ne sera pardonné à celui à qui la vie a souri. Et si par malheur il dévie du droit chemin le plus strict, la société ne l’épargnera pas et peu importe que ce soit à son travail, à son talent et à ses efforts que l’on doit attribuer sa réussite.  

Les temps ont changé. Et pourtant, pourtant...

Assise au premier rang, une si belle femme, si élégante, à qui la vie a tout donné, trop donné pour certains. Elle assiste à l’audience de son président de la République de mari poursuivi pour corruption.

En laissant paraître Carla Bruni à une des audiences du tribunal où il était prévenu, Nicolas Sarkozy a montré qu’il n’avait aucunement  perçu les évolutions sociales de ce nouveau monde qui est venu en ce premier mars deux mille vingt et un, le heurter à pleine vitesse, au moment où il s’y attendait le moins. 

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21 février 2021 7 21 /02 /février /2021 09:43

Après être passé par plusieurs cabinets ministériels, la carrière de ce haut fonctionnaire va connaitre un tournant décisif le 11 février 2020 lorsqu’il sera nommé par le président Kaies SAIED, premier-conseiller chargé des affaires juridiques au palais de Carthage. Seize jours plus tard, il obtiendra le poste hautement stratégique de  ministre de l’intérieur et après cinq mois, celui de  chef du gouvernement.

Hichem MECHICHI, un physique rassurant, tout en rondeur, un peu à la Raymond BARRE, qui comme l’ancien Premier ministre français qui n’a jamais appartenu à aucun parti politique, saura faire preuve d’une grande fermeté dans l’exercice de sa fonction.

Une carrière fulgurante, pour cet ancien énarque âgé à peine de 47 ans, qu’il doit à l’évidence en grande partie au président de la république, qui a certainement pensé tenir en lui son homme lige.

Mais Hichem MECHICHI, à peine désigné par son mentor pour former le gouvernement, négociera les portefeuilles ministériels avec l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) pour obtenir sa confiance et être  nommé chef du gouvernement. C’est encore avec elle qu’il déterminera la politique à conduire, car c’est un truisme de le dire, c’est l’Assemblée  qui vote les lois et qui le censurera s’il avait quelques velléités de vouloir s’affranchir de sa tutelle.

Ce n’est donc pas par déloyauté ou par ingratitude vis-à-vis de son mentor, qu’Hichem MECHICHI, aussitôt désigné pour former le gouvernement, s’est rangé du côté de l’assemblée, mais par application de la constitution.

Et lorsqu’en fin d’année 2020, la majorité parlementaire, a souhaité modifier la composition gouvernementale, il n’aura pas d’autre choix que d’accéder à sa demande.

La crise qui s’en est suivie au sommet de l’état, unanimement condamnée par la vox populi, n’a épargné personne et a « naturellement » conduit certains esprits à s’interroger sur l’avenir d’Hichem MECHICHI à la tête du gouvernement, six mois à peine après sa nomination.

Mais la crise qui l’a opposé au président de la République, ne sera pas de celle qui pourra l’atteindre. Bien au contraire, elle l’aura renforcé.

Face à elle, il  a montré qu’il avait un profil parfaitement compatible avec l’ensemble des partis qui constituent la majorité parlementaire.

Il a par ailleurs fait preuve à cette occasion, d’une force de caractère et d’une maîtrise peu commune :

Il ne s’est guère laissé impressionner par  le comminatoire terme de corruption jeté à la volée par le président, sur les personnalités qu’il a proposées  à l’exercice des fonctions ministérielles ; « corruption », un  nom qui pourtant dans l’histoire récente de la Tunisie, en a fait reculer plus d’un.

Il a de même résisté à l’aura du président qui par son élection et depuis lors, bénéficie d’une  assise populaire incontestable, tout comme il osera décliner son interprétation de la constitution, malgré ses compétences universitaires reconnues en la matière.    

Sans se démonter, Hichem MECHICHI  a pour toute réponse à cette attaque en règle, démis de leurs fonctions les cinq ministres qui étaient sur la sellette et qui avaient le soutien du président, puis il a redistribué leurs fonctions aux ministres restés en place, contournant avec habileté et de façon juridiquement incontestable, le blocage mis en place par le président, à la suite de la tentative de remaniement.

Sauf circonstances particulières, on voit difficilement Hichem MECHICHI, être  maintenant évincé par une motion de censure, comme quelques oiseaux de mauvaise augure le prédisent.

Selon l’article 97 de la constitution, cela nécessiterait, outre un vote à la majorité absolue de l’ARP, la désignation dans le même temps de son successeur, ce qui est  toujours très compliqué à obtenir. Dans les circonstances sanitaires économiques, sociales et de sécurité précaire que connait la Tunisie, se lancer à nouveau dans des opérations de nature politiciennes, aurait un effet désastreux.

De plus enfin et surtout, ce serait un renoncement sur la nature même du régime parlementaire voulue par les constituants de 2014, un régime qui se présidentialiserait, en reconnaissant de facto, l’intervention du président de la République dans la nomination des ministres, autres que ceux de la défense et des affaires étrangères.

Sauf circonstances exceptionnelles, le locataire de Dar El Bey n’est pas prêt de faire ses bagages, sauf si l’on devait considérer du côté du palais du Bardo que l’on n’a jamais intérêt à avoir à la tête du gouvernement un homme de trop grande envergure ; mais n’allons pas trop loin dans le machiavélisme...

Oui, il y a incontestablement du Raymond BARRE chez Hichem MECHICHI, rondeur et  fermeté, c’est peut-être le secret de la longévité au gouvernement, rappelons que Raymond BARRE est resté près de cinq ans premier ministre, un des plus longs règnes à Matignon.

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17 février 2021 3 17 /02 /février /2021 11:13

Auréolé de ses 72% de suffrages exprimés à la présidentielle et du prestige que lui donne sa qualité de professeur des universités en droit constitutionnel, le président SAIED, dont l’intégrité et la haute autorité morale sont unanimement reconnues, a tenté d’imposer une lecture de la constitution qui lui aurait donné le pouvoir d’intervenir dans la nomination des ministres. (1)

Pour parvenir à ses fins, le président SAIED, à l’occasion d’un remaniement ministériel qui a eu lieu en janvier 2021, a refusé de recevoir la prestation de serment des nouveaux ministres, mettant en cause la probité de certains d’entre eux, parlant de conflit d’intérêt et de corruption.  

Ne pouvant se montrer plus précis, le président a très vite abandonné cette voie, lui en préférant une autre qu’il connaissait mieux, celle de la constitution. Il pensait pouvoir y puiser le moyen de fonder sa fin de non-recevoir, d’autant qu’il suggérait, qu’en tant que président de la République et en l’absence de cour constitutionnelle, il était le mieux à même d’interpréter le texte fondamental.

*

Cependant, le chef du gouvernement, Hichem MECHICHI, nullement impressionné par l’aplomb présidentiel et soutenu par la majorité parlementaire, a mis en demeure le président SAIED de désigner les ministres mis en cause et de dire ce qui leur était reproché, de même qu’il lui a demandé de dire ce qui lui paraissait non conforme à la constitution dans le remaniement opéré.

Surpris par cette réaction, ce ne sera qu’un mois plus tard que le président manifestement embarrassé lui répondra officiellement, dans une lettre datée du 15 février, qu’il l’avait informé sur la mise en cause des ministres, sans plus de précision et le renvoyait pour le surplus à l’instance anticorruption. 

Sur le caractère inconstitutionnel des nominations objet du remaniement, le président a indiqué dans sa lettre que c’est l’article 92 (2) qui aurait dû s’appliquer et non l’article 89 (1). Qu’il n’y avait donc nul besoin de solliciter la confiance de l’assemblée des représentants du peuple et qu’il aurait dû être statué sur le remaniement, en conseil des ministres (3).

Une position singulière, dans la constitution de 2014, c’est l’article 89 qui régit la nomination des ministres(1), l’article 92 concerne l’organisation et les compétences des départements ministériels et la cessation de fonction d’un ou de plusieurs membres du gouvernement. (2)

Ni la dénonciation d’actes de corruption, ni l’interprétation de la constitution, ne devait permettre au président SAIED d’infléchir la position du chef du gouvernement qui, coïncidence ou non, démettait de leurs fonctions, le jour même de la réception de la lettre présidentielle, cinq ministres que l’on disait proches du chef de l’état. Il répartissait ensuite les compétences ministérielles laissées sans attributaires, entre les ministres en exercice, mettant ainsi fin à la situation créée par le refus de recevoir la prestation de serment.

*

Notons que la lettre du 15 février que le président a adressée au chef du gouvernement est une lettre manuscrite, invoquant la nécessité pour le pouvoir politique « d’exprimer la volonté réelle du peuple » ajoutant que la prestation de serment avait un impact dans la vie mais aussi « le jour du jugement dernier ».  Une façon par des formules générales, sans application juridique directe, de siffler la fin de la partie, une partie qu’il reconnaissait par la même avoir perdue.

D’ailleurs les observateurs ont noté, et ce n’est pas anecdotique quand on commence à cerner la personnalité du président SAIED, que la lettre adressée au chef du gouvernement  a été datée de l’un des mois du calendrier de l’héjire, « rajab al assam » ce qui signifie le mois de rajab le sourd, mois pendant lequel on s’interdisait de faire la guerre…Une façon élégante de mettre fin aux hostilités

 

(1) L’article 89 de la constitution dispose : « Le Gouvernement se compose du Chef du Gouvernement, de ministres et de secrétaires d’État choisis par le Chef du Gouvernement, et en concertation avec le Président de la République en ce qui concerne les ministères des Affaires étrangères et de la Défense. (…)Dans le cas où le Gouvernement obtient la confiance de l’Assemblée, le Président de la République procède sans délai à la nomination du Chef du Gouvernement et de ses membres. Le Chef du Gouvernement et les membres du Gouvernement prêtent, devant le Président de la République, le serment suivant : « Je jure par Dieu Tout-Puissant d’œuvrer avec dévouement pour le bien de la Tunisie, de respecter sa Constitution et ses lois, de veiller à ses intérêts et de lui être loyal.»

 (2) L’article 92 de la constitution dispose :: « Relèvent de la compétence du Chef du Gouvernement :

- la création, la modification, la suppression des ministères et secrétariats d’État, la détermination de leurs compétences et de leurs attributions, après délibération du Conseil des ministres ;

- la cessation de fonction d’un ou de plusieurs membres du Gouvernement ou l’examen de sa démission, et en concertation avec le Président de la République en ce qui concerne le Ministre des Affaires étrangères ou le Ministre de la Défense »

 

(3)Selon le président SAIED, l’article 89 n’étant pas applicable, les ministres objet du remaniement n’avaient pas à demander la confiance à l’ARP. Le président ajoutait que selon l’article 92, le remaniement aurait dû être délibéré en conseil des ministres, que ne l’ayant pas été, il est inconstitutionnel.

Même si l’on adoptait cette façon de voir les choses, et qu’un remaniement ministériel ne nécessiterait pas la confiance de l’ARP, on aboutirait à une totale incohérence dans l’application des dispositions constitutionnelles. Il serait aisé en effet pour un chef de gouvernement de se passer de l’aval de l’ARP voulu par les constituants de 2014 et contenu dans l’article 89. Il suffirait, après avoir obtenu la confiance de cette dernière au moment de la formation du gouvernement, de  modifier ensuite sa composition à souhait selon le bon plaisir du chef du gouvernement pour avoir les ministres qui lui conviennent le mieux, sans que l’ARP ait son mot à dire.

De toute façon, quand bien même cette formalité ne serait pas obligatoire, on ne voit pas en quoi, le fait d’avoir sollicité et obtenu la confiance de l’ARP, vicierait les nominations ministérielles. 

De même l’exigence selon le  président SAIED de statuer sur le remaniement en conseil des ministres, ne changerait pas grand-chose quand bien même cette formalité n’aurait pas été accomplie. Il suffirait de recommencer la procédure, cela prendrait plus de temps, mais on aboutirait au même résultat. 

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11 février 2021 4 11 /02 /février /2021 13:51

C’est le président SAIED qui a ouvert les hostilités, en bloquant une procédure de nomination de onze ministres, issus d’un remaniement. Il a refusé de recevoir leur prestation de serment, au motif que certains d’entre eux, (mais sans dire qui), seraient susceptibles d’avoir commis des actes susceptibles d’être qualifiés de conflits d’intérêts, voire de corruption, (mais sans dire lesquels).

Singulière prise de position du président, que de mettre à l’index des personnalités jetées en pâture à l’opinion publique en portant atteinte à leur honneur et à leur considération, sans même leur opposer de faits délictueux, alors  qu’aucune procédure judiciaire n’est en cours, que par conséquent aucune décision de justice n’a été prise à l’encontre d’aucun des mis en cause, et sans s’embarrasser des principes juridiques de nature constitutionnels, tels que séparation des pouvoirs et présomption d’innocence

Quelques temps plus tard, le président SAIED ajoutera une autre justification à son refus de recevoir la prestation de serment, les nominations ne seraient pas conformes à la constitution, (mais ici encore, sans dire en quoi il y aurait inconstitutionnalité).

En empêchant 11 ministres de prendre leur fonction, le président SAIED a bloqué le fonctionnement du gouvernement.

On a parlé de coup de force politique, ça y ressemble fort. Le président SAIED, s’en est allé ensuite se faire applaudir par les passants de l’avenue Bourguiba et dans les quartiers de l’Ariana montrant ainsi qu’il disposait du soutien populaire.

On comprend bien que l’affaire est sérieuse et qu’un risque de confrontation n’est pas à exclure, le président de l’assemblée des représentants du peuple, Rached GHANNOUCHI, n’ étant certainement pas disposé, alors qu’il possède le premier parti de l’assemblée et une majorité qui lui permet de gouverner, à donner au président SAIED plus de pouvoir que ne lui en confère la constitution.

Dans un régime parlementaire tel qu’il a été voulu par les constituants de 2014, le chef du gouvernement désigne les ministres qu’il entend soumettre au vote de l’assemblée des représentants du peuple. Lorsque cette dernière a validé le choix du chef du gouvernement, le président qui n’intervient pas dans ce choix, sauf pour les ministères de la défense et des affaires étrangères ce qui n’est pas le cas en l’espèce, reçoit leur prestation de serment.

Tout ça est donc très clair. Mais en refusant la formalité de la prestation de serment, en prenant le risque de contrevenir à la constitution, où le président veut-il en venir ?

Si c’était comme tout le laisse penser pour pouvoir être consulté sur la nomination des ministres et peser sur cet acte important, ce serait une situation inédite, car pourquoi alors ne procèderait-il pas de même pour les autres pouvoirs et en particulier pour le pouvoir législatif en l’accaparant en refusant de promulguer les lois qui ne lui conviennent pas et détenir de la sorte la réalité du pouvoir.

On a parlé d’un coup d’état constitutionnel. Nous verrons bien comment tout cela va évoluer, mais il est certain que dans la situation que nous connaissons actuellement en Tunisie, peut-être que l’on aurait pu se dispenser d’une telle crise.

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11 février 2021 4 11 /02 /février /2021 03:46

La Tunisie a eu du mal à se procurer le fameux vaccin, ce serait désormais chose faite, la campagne de vaccination ne devrait plus tarder. Ce fut fait en lançant des appels, des cris d’alarme pour secouer le gouvernement à prendre des risques et à agir

S’il ne fait aucun doute que le vaccin est la solution la plus efficace contre cette terrible pandémie, on ne sait pas dans quelle mesure et pour combien de temps les finances de l’Etat pourront supporter une telle charge. Il faut bien intégrer en effet, que la protection par le vaccin, serait de 8 mois à une année en moyenne et qu’il faudrait dès lors, comme pour la grippe, renouveler l’injection selon la périodicité de l’immunité vaccinale, d’autant que nous sommes en présence d’un virus qui mute, nécessitant une constante adaptation.

La vaccination de l’ensemble de la population semble d’autant plus compromise, qu’outre les problèmes budgétaires, une étude récente réalisée par Emrhod consulting, a indiqué que seuls 40% des tunisiens accepteraient de se faire vacciner. On serait là loin du compte pour espérer acquérir une immunité collective qui permettrait au pays de repartir économiquement, en laissant les personnes circuler à nouveau librement.

Tenant compte de ces éléments financiers et scientifiques, il est fort probable qu’avec le seul vaccin, la population resterait soumise à ce fléau pour encore longtemps.

Une nouvelle perspective de lutte s’offre désormais à nous, avec l’arrivée prochaine annoncée d’un médicament qui traiterait la maladie à titre curatif. Ce serait certainement pour nous tunisiens, une solution complémentaire, adaptée à notre situation propre. Certes la vaccination resterait la base de la lutte contre la covid 19, mais pour tous ceux qui ne pourraient ou ne voudraient pas être vaccinés, ce serait un moyen de les soigner et par conséquent, de sortir de la crise.

Les choses commencent à bouger sérieusement dans le domaine du traitement de la maladie. Rien qu’en France, les CHU de Limoges et de de Mont de Marsan testent actuellement un médicament, le XAV-19, l’essai clinique dont il fait l’objet est prometteur, on parle d’une mise à disposition du médicament dès cet été, la France est sur le point de signer une précommande. On parle aussi d’un médicament qui aurait été efficace pour 96% des patients traités. Il est fort probable, que comme ce fut le cas pour le vaccin, d’autres médicaments créés par d’autres pays, vont arriver plus ou moins rapidement sur le marché.

Notons que le médicament français XAV-19 serait, pour le moment, surtout efficace pour des atteintes modérées, dont l’infection aurait été relativement récente. Mais le nouveau médicament éviterait pour cette catégorie de patients le passage en réanimation, ce qui est loin d’être négligeable.

Si les choses se concrétisaient, ce serait un moyen de soigner la plupart des malades et de réduire considérablement la propagation du virus, en attendant une évolution du médicament pour une efficacité vers les formes les plus graves du virus.

Je me permets alors, très modestement, de faire deux préconisations

-Le ministère de la santé, si ce n’est déjà fait, devrait s’intéresser à cette découverte avant qu’elle ne soit envahie par les nombreuses sollicitations qui ne manqueront pas d’affluer au fur et à mesure des essais cliniques. Nous pourrions envoyer des experts pour s’enquérir de la fiabilité du traitement au vu des premiers résultats et envisager le cas échéant une précommande, dans les meilleures conditions financières.

-Par ailleurs, la Tunisie dont on sait que la principale ressource sont les ressources humaines, devrait envisager de contacter la startup Xenothera à l’origine du projet et lui proposer d’installer en Tunisie des laboratoires pour la fabrication du médicament, qui pourraient desservir le Maghreb et l’Afrique en tout ou partie. La Tunisie qui a quatre facultés de médecine de renommée possède un personnel médical de pointe, qui est certainement parmi les mieux formé

Activons nos réseaux et notre diplomatie, gardons-nous de ne pas rater le tournant du médicament contre la Covid19, plus tard, il sera trop tard.

 

*Article publié sous ce titre dans le quotidien La Presse de Tunis par Abdelmajid SAHNOUN, ancien haut fonctionnaire.

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6 février 2021 6 06 /02 /février /2021 07:48

Afin de protester contre le fait qu’il n’a pas été associé à la désignation des douze ministres objet du remaniement du mois de janvier 2021, le président SAIED a déclaré  à l’occasion du conseil de sécurité qui s’est tenu au palais de Carthage le 25 de ce même mois, qu’il refusait de recevoir la prestation de serment des nouveaux ministres.

Il indiquait que certains d’entre eux étaient concernés par « des soupçons de conflit d’intérêt », mais il ne donnait aucune précision, ni sur les griefs qu’il formulait, ni sur les ministres mis en cause.

Se rendant certainement compte de la vanité de telles allégations d’ordre pénal, sur lesquelles seule la justice peut se prononcer, le président SAIED a changé son fusil d’épaule.

Il affirme désormais que les nominations ministérielles ne sont pas conformes à la constitution sans donner, ici encore, plus de précision.

La loi fondamentale paraît pourtant assez claire en ce qui concerne la procédure de nomination des ministres. Après avoir été choisies par le chef du gouvernement, les personnalités proposées à la fonction ministérielle ont fait l’objet d’un vote conforme de la part de l’assemblée des représentants du peuple, en application de l’article 89 de la constitution.*

Une position par conséquent surprenante du chef de l’Etat, car on ne voit pas très bien ce qui, dans la procédure de nomination, est contraire à la constitution.

Mais si l’on y réfléchit bien, le fait de soulever l’inconstitutionnalité des nominations, sans avoir même à se préoccuper du bien-fondé du recours annoncé, est d’une redoutable efficacité dans la stratégie du président SAIED d’imposer son autorité face à l’assemblée des représentants du peuple, dont le président, M. Rached GHANNOUCHI, avait déclaré « que le rôle du président de la République dans la constitution de 2014 était purement symbolique ».

Et en effet, toute l’habileté de la position du président vient de ce que la cour constitutionnelle prévue par la constitution de 2014, pour statuer notamment sur les conflits de compétence entre le président de la République et le Premier ministre (art.101 de la constitution), n’a toujours pas été installée, certains de ses membres n’étant toujours pas nommés **. Ainsi, en l’absence de cour constitutionnelle, Il ne pourra pas être statué sur le grief d’inconstitutionnalité soulevé par le président de la République. ***

De la sorte, le président SAIED pourra se prévaloir d’attendre la décision de la cour constitutionnelle, à une date indéterminée, avant le cas échéant de recevoir la prestation de serment des nouveaux ministres, ce qui est tout à fait conforme à la règle de droit applicable.

* Précisons que l’article 89 de la constitution ne prévoit la participation du chef de l’Etat au processus de nomination ministérielle, que pour « les ministres et secrétaires d’Etat de la défense et des affaires étrangères, [qui sont] choisis par le chef du gouvernement, en concertation avec le Président de la République » Aucun de ces deux ministères n’étant concerné par le remaniement, l’intervention du président de la République dans le processus de nomination n’avait pas lieu d’être.

 ** La constitution, dans son article 148 alinéa 5, a prévu  que la cour constitutionnelle serait créée dans le délai d’un an après les élections législatives du 26 octobre 2014, soit au plus tard le 26 octobre 2015.

L’assemblée des représentants du peuple n’a pu se mettre d’accord pour désigner les quatre membres dont les nominations relèvent de sa compétence. (Quatre membres sont également nommés par le président de la République et quatre par le conseil supérieur de la magistrature).

*** La constitution de 2014 a bien prévu dans l’attente de la mise en place de la cour constitutionnelle une « instance provisoire chargée du contrôle de la constitutionnalité des projets de lois ». (loi organique du 18 avril 2014). Cette instance continue d’assurer sa fonction de contrôle de constitutionnalité des projets de loi, mais comme son intitulé l’indique, à l’exclusion des autres contrôles de constitutionnalité pour lesquels elle n’a pas compétence. L’instance provisoire a seulement étendu de facto sa compétence à l’occasion du décès en juillet 2019 en cours de mandat du président Beji Caïd Es Sebsi, pour constater la vacance de la présidence de la République.

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