Mon Dieu ! Quelle horreur ! Un ministre de la République, que dis-je, des Affaires Etrangères a accepté d’aller de TUNIS à TABARKA, donc à l’étranger, dans l’avion de l’un de ses amis. Vingt minutes de vol. Cela ne vous paraît rien, surtout pour qui ne craint pas l’avion, mais ces vingt minutes seront les plus lourdes de la carrière de la Ministre, elles compteront pour des millions. Sans compter l’atterrissage, quelques semaines plus tard...
Mais enfin, rendez vous compte ! Elle est montée avec son compagnon lui aussi ministre (Ah ! Ah! Elle n’est donc pas mariée) dans un avion privé et il paraît que le propriétaire de l’avion, « homme d’affaire » tunisien (donc forcément véreux) est un proche du dictateur Ben Ali, figurez vous qu’il avait signé une pétition pour demander au dit dictateur de se représenter en 2014 !
L’affaire est entendue, il faut qu’elle démissionne et tout de suite ! D’ailleurs même COCHET, le député vert, pourtant toujours si modéré dans ses interventions, comme son copain MAMERE, lui a demandé « amicalement » de démissionner, il semblait même outré, choqué, je ne vous dis pas. Et pourtant et c’est un vrai scoop il dit être son ami. Alors, même si ses amis demandent sa démission c’est que c’est vraiment très grave. Oh mon Dieu, je ne sais pas pourquoi tout à coup cette phrase de Clément MAROT me revient à l’esprit : « Avoir mangé en période de carême le lard et la viande toute crue ». Je n’y crois pas. Mais oui c’est sûr c’était écrit dans le Canard Enchainé, c’est donc que c’est forcément vrai et que c’est forcément grave. Etre montée vingt minutes dans l’avion d’un homme d’affaire, en Tunisie, pendant ses vacances, avec son compagnon et avoir ainsi profité de ses « largesses ». Si, si toute la journée LCI a parlé de « largesses » et ce alors même que deux semaines plus tard le BEN ALI en question, avec qui l’homme d’affaires était en quelque sorte acoquiné, a été renversé.
Démission, démission ! Ah cela fait du bien ! Heureusement qu’Yves COCHET veille. Et que l’on ne vienne pas nous dire que la France a pourtant toujours considéré que ce BEN ALI était, comme d’ailleurs son prédécesseur Habib BOURGUIBA coqueluche de l’occident et des plus grands intellectuels et journalistes de la presse bien pensante française, un allié incontournable du Maghreb en Europe. Que l’on ne vienne pas non plus nous dire que des grands démocrates comme Bertrand DELANOË ou Philippe SEGUIN l’ont assidûment fréquenté. D’ailleurs le premier a démenti, cela faisait plusieurs mois qu’il ne le voyait plus, quant au second, paix à son âme. C’est inqualifiable ! Quand je pense à tous ces français qui allaient se goberger dans les palaces tunisiens pour trois francs six sous, alors que le peuple, sous le joug d’un tyran, mourait de faim, messieurs dames, la fête est finie, le dictateur parti, il faudra payer le juste prix des choses, fini les voyages blach (gratuits) en avion, fini les amis tunisiens chez qui on allait se bâfrer de couscous jusqu’à s’en faire péter la sous-ventrière, vous allez voir ce que vous allez voir, Il est fini le bon temps de BEN ALI ! » Démission ! Démission !
Pour en revenir à notre voyage, tout le monde (sauf la presse) sait aujourd’hui que dans de nombreux cas, la voiture ou le bateau revient plus cher que l’avion et qu’ainsi pour aller hors saison (ce qui est notre hypothèse) de Paris à Ajaccio, l’avion est moins cher de moitié par rapport au voyageur qui prend l’autoroute ou le train puis le bateau. La fameuse « largesse » dont a bénéficié notre indigne Ministre des Affaires Etrangères peut être évaluée à une centaine de dinars tunisiens soit environ 50 €, taxes déduites. Mais dans la mesure où Michèle ALLIOT MARIE justifie qu’elle-même avait emmené son hôte en promenade à St Jean de LUZ et si l’on déduit le prix de l’essence qu’elle a donc dû payer, encore qu’elle se souvient qu’elle avait pris pour l’occasion sa Peugeot 308 diesel et qu’à l’époque ce carburant était plus cher que le 95 sans plomb il n’y a rien à dire, d’autant que ne fumant ni l’un ni l’autre il n’y aura pas lieu à tenir compte du budget tabac... Voilà où nous en sommes arrivés. Démission ! Démission !
Pour ce qui est du compagnon, tout le monde sait aujourd’hui que le droit commun est constitué par les unions hors mariage supérieures en nombre, mais cela n’empêche quand même pas la presse de souligner toujours cet aspect des choses lorsqu’elle cherche à discréditer quelqu’un, cela donne, l’air de rien, une petit quelque chose de « pas très catholique ». Il n’y a pas encore si longtemps, dans les fiches de renseignements de la police destinées aux tribunaux, il y avait une question pré imprimée « l’intéressé vit-il en concubinage ?». Nous nous souvenons tous des titres de journaux sur la fille « illégitime » de François MITTERAND. Sans qu’aucun parallèle ne puisse être établi, BEN ALI aussi y a eu droit. Pour décrire le dictateur, toute la presse bien pensante a parlé de la 2e épouse de BEN ALI (tiens tiens, il était donc divorcé) et d’ajouter, pour faire bonne mesure, « à une ancienne coiffeuse ! » D’autres se montrant plus objectifs ont ajouté qu’après enquête, il était apparu que cette 2e épouse avait bien son CAP de coiffure mais qu’en réalité elle n’avait jamais exercé. Ouf ! ce pauvre BEN ALI, si l’on peut s’exprimer ainsi, en avait suffisamment sur le dos pour que l’on ne vienne pas encore dire qu’il était divorcé et qu’en plus il s’était remarié avec une coiffeuse qui avait exercé son métier.
En fin de compte si ALLIOT Marie était montée dans la voiture d’un ami tunisien pour le coup coiffeur, elle n’aurait pas eu de problème, même si en réalité elle aurait fait une meilleure affaire selon la cylindrée de la voiture et sa consommation à condition, bien sûr, qu’ils ne se soient pas arrêtés en chemin pour dîner, ce qui aurait pu tout changer selon la catégorie du restaurant, les plats choisis ; une langouste, même en Tunisie, peut se monter à 75 € et selon qu’elle aurait offert ou non le repas à ses hôtes. Ah ! Ah ! Et comme l’on dit, qui vole un œuf vole un bœuf !
Bon, cessons de plaisanter, admettons qu’elle n’a pas gagné grand-chose et que l’on n’arrive même pas aux 150 € fixés par la commission sur les conflits d’intérêts. Mais tout de même, il n’empêche que cet homme d’affaire (Pouah) était un proche de BEN ALI ( Re pouah) puisqu’il a signé une pétition de soutien en sa faveur, c’est donc bien un saligaud et qui s’assemble se ressemble….
Ceux qui soutiennent une telle ânerie démontrent qu’ils ne connaissent rien à la Tunisie et aux dictatures du monde arabe. Pensez vous que dans la Tunisie de l’ère BEN ALI il a existé un seul chef d’entreprise qui a pu exercer benoîtement son activité, après avoir refusé l’offre qui lui avait été faite, comme à toutes les personnalités en vue, de signer une pétition de soutien au régime ? Qui peut dire cela, qui peut donner le nom d’un seul chef d’entreprise, d’un seul homme d’affaire, d’un seul fonctionnaire qui se soit permis de refuser la carte du parti unique ou de refuser de le soutenir financièrement ou de refuser d’afficher la photo du dictateur encadrée dans son bureau, dans son magasin ou même d’affirmer publiquement sa neutralité ? Si on m’avait dit que l’ami de Mme ALLIOT MARIE avait refusé de signer la pétition de soutien à BEN ALI je ne l’aurais pas cru comme ne l’auraient pas cru les dix millions de tunisiens ainsi que tous ceux qui s’intéressent à la Tunisie et qui aiment vraiment ce pays.
Enfin, mais on n’est pas dans cette affaire à une contradiction près, comment peut on en même temps affirmer que les TRABELSI étaient d’abominables individus qui rackettaient les entreprises et soutenir ensuite, pour les besoins de la cause, que les victimes de ces rackets étaient des collaborateurs bienheureux.
Il n’y a rien qui tienne dans cette affaire pas même l’histoire du « savoir faire » dont le seul tort est d’avoir été proposé sans savoir que le régime allait s’effondrer, car quand la police tire à balles réelles sur le peuple, on est certainement mieux avisé de lui proposer de lui enseigner des méthodes démocratiques de maintien de l’ordre que de faire des communiqués qui ne présentent aucun intérêt, le ci devant OBAMA étant en train d’en faire l’amère expérience.
Mais derrière tout cela il y a un problème de politique interne française Le Problème de Michèle ALLIOT MARIE est d’être une femme loin du peuple qui pense avoir réussi car tout lui a toujours souri, tous les ministères, Ministre d’Etat, ménagée par les Présidents de la République, pouvant se permettre de négocier sa place ou celle de proche au gouvernement. Autant un Nicolas SARKOZY est un enfant du peuple, parlant comme le peuple et avec ses manières, (on le lui a assez reproché), autant une Michèle ALLIOT MARIE donne l’impression d’une femme cassante, affichant un certain mépris pour autrui, voire une certaine arrogance, se sentant définitivement supérieure, sûre d’elle, hautaine. Elle affiche un sourire carnassier sans jamais se départir d’une grande assurance qui la fait craindre. J’ai été frappé de voir que sur une affaire de cette indigence elle n’avait eu aucun soutien, je l’ai trouvée bien seule.
Le destin lui a pourtant donné récemment la chance de trouver sur son chemin un homme bon, honnête, loyal, un grand humaniste Jean Marie BOCKEL. Mais, considérant qu’il n’avait pas uns grand rapport de force à lui opposer, elle l’a traité avec dédain, elle lui a fait sentir tout son mépris, parfois même d’une façon, que l’on aurait pu considérer humiliante. Pour elle, il ne présentait aucun intérêt politique il n’était donc rien. Trop petit le Jean Marie, comme dirait l’autre, « combien de divisions ? » Une femme de cette envergure, s’intéresser à un Jean Marie BOCKEL et puis quoi encore ! Et bien elle a eu tort, elle a commis une faute politique majeure. François MITTERAND disait toujours qu’une élection présidentielle se gérait de la même façon qu’une élection cantonale et qu’elle se gagnait à la marge. Il n’aimait pas le peuple mais le respectait car il savait que c’était grâce à lui qu’il existait politiquement. C’est aujourd’hui un Jean Marie BOCKEL qui aurait pu sauver Michèle ALLIOT MARIE de ce qui est désormais un naufrage politique, alors même qu’elle était au sommet de sa gloire. Une carrière politique comme toute activité exposée, doit se faire en travaillant sans cesse, dès le premier jour, pour se préparer au jour où l’on viendra vous chercher pour vous exécuter sur la place publique devant un peuple avide du sang des plus grands. Paradoxalement, ce seront les plus petits qui pourront vous sauver. Il est très peu probable, même avec le temps que la Ministre des Affaires Européennes et Etrangères puisse surmonter une telle campagne de discrédit. Personne n’est jamais revenu de ce qui touche à l’argent, même quand c’est injuste, infondé, voire stupide, comme c’est le cas en l’espèce. La vie politique est ainsi faite. Et c’est dans ces moments là que l’on compte ses vrais amis, qui de toute façon, en politique, ne sont jamais très nombreux. Personnellement, je vous aimais pourtant bien en tant que femme. De plus vous êtes une amie de la Tunisie.
Bislama orti MAM.*
*En dialecte tunisien : au revoir ma sœur MAM.
Youssef El TOUNSI